Courant sur le début de la nouvelle année, le mois de janvier ne s’étend souvent que sur celle qui l’a précédée.
Avec moult touches d’émotions fanées, on s’y délaie sans délais sur ce qui a fait les 12 mois défaits…
A contrario, je ferai bref et brutal, partiel et partial.
Sur le mode : musique, ciné et bouquins !
Musique
Alors que certains se complaisent à l’injonction : « doucement les basses ! », ce sont bien ces 4 cordes de base qui sont revenues en force à mes oreilles, au moins dans la deuxième moitié de 2022. Je m’étendrai ailleurs sur les causes sensibles et raisons physiologiques de cette accord majeur persistant.
Du coup, nouveauté à noter, je me suis mis à écouter beaucoup de bassistes de Jazz, réputés pour leur originalité ou leur virtuosité à cet instrument.
Découverte, entre autres, de Victor Wooten.
Avec une mention spéciale pour l’enthousiasmant Alexandre Lapointe de « The Brooks », en particulier pour sa super présence scénique à Aix-en-Provence, en juin dernier, et ailleurs tout le temps des concerts.
« Drôlement » charismatique, le garçon !

Et retour à Les Claypool pour son dernier album avec Primus.

Mais je suis aussi revenu à sa collaboration avec Sean Lennon pour les albums et les lives de leur « The Claypool Lennon Delirium ». Collaborations psyché-surréalistes, dans les paroles comme dans les partitions ou les reprises, pour une vision « décalacide » d’un imaginaire qui s’effiloche jusque dans l’eau au mercure ou dans l’air que nous respirons.

Cinéma
Sur les quelques films vus en 2022, je retiendrai ma plus grande surprise.
Je me suis rendu à la salle obscure sans conviction…
Et j’ai pourtant été subtilement et durablement soufflé par le « Petite Fleur » de Santiago Mitre. Sur l’air éponyme de Sidney Bechet.
Avec un Melvil Poupaud inattendu et sardonique à souhait et un Sergi Lopez plus vrai que nature dans le rôle du gourou manipulateur.
Un vaudeville moderne à inversion de rôles sociaux où le réalisateur joue habilement sur une profondeur de certains seconds rôles et de leurs décors intérieurs. Ils sont toujours si bien suggérés que la subtilité tient peut-être de l’illusion…
Un film intelligent, malin. Tendre et ironique. Il comble le spectateur jusqu’au sourire persistant bien après la séance… Avec une curiosité récurrente sur tout ce qui ne nous a pas été dit, même si ce n’était pas vraiment important…
Mais justement.

Lecture
Sur la quarantaine (au moins…) de romans lus, retenons (parfois en redite) 1 gros roman et 3 « petits » textes puissants. Tous sortis dans l’année même si je ne suis pas un coureur de nouveautés (j’y reviendrai…) :
– « Le Maître des Djinns » de P. Djèli Clark, chez L’Atalante, traduit par Mathilde Montier :
Le Caire 1912, l’Islam s’est imposé. Mais les Djinns sont revenus. Ils ont modernisé la capitale égyptienne, entre règne de la vapeur et des enchantements sophistiqués.
Une Dandy enquêtrice de l’Étrange doit démasquer un imposteur criminel qui prétend être un prophète ressuscité…
Même si je ne suis pas très « moyen-orientalisant », j’ai été soufflé hors de ma lampe magique de confort par une ambiance envoûtante, des personnages magnétiques, des Djinns fascinants et des relations humaines très « modernistes », même si parfois soufflées par un angélisme fragile. Un vrai coup de Génie. Beau comme les Mille et une Nuits en Belle Époque, voilée de religions, de démences et de Djinneries.
– « L’Ombre de l’Aigle », d’Arturo Perez-Reverte chez « Le Temps des Cerises », traduction Simon Vialle :
Avec une truculence épique, le maestro hispanique cisèle une petite fresque feuilletonnesque autour d’un bataillon espagnol, « napoléonisé » d’office et perdu dans la campagne de Russie… Avant et pendant la débâcle.
Un plaisir bref et intense, mordant, au style flamboyant, qui n’épargne aucun protagoniste et où chacun en prend pour son grade, quelle que soit sa nationalité ou son poste.
– « Les Cantiques du Corbeau », de Bartabas, chez Gallimard :
Un petit recueil pulsionnel de courts textes sur l’aube de l’humanité… Où l’humain est encore boue, oiseau, proie et aussi prédateur. Puissants, charnels, violents, émouvants et poétiques. Un choc fascinant sur nos racines animales fantasmées et enivrantes.
– « Un An dans la Ville-Rue », de Paul di Filippo, Le Bélial’, traduction Pierre-Paul Durastanti :
Une novella envoûtante et hallucinée dans un monde contraint en une seule longue rue. Les sociétés se développent en quartiers allongés. Sur un an, la vie d’un romancier populaire qui va être l’heureux élu d’un voyage culturel…
Décalé, fantastique et terriblement…
Vraiment terriblement humain !
Un rêve doux-amer qui se griffe aux cauchemars.
À l’année prochaine pour un « Brutal Bilan Bref » 2023.
© Georges FOVEAU – Janvier 2023